RAPPORT DE LA COMMISSION D’ENQUÊTE BROSSARD SUR L’AFFAIRE COFFIN (27 NOVEMBRE 1964)
VOL. 1 CHAPITRE 5 (Sixième partie)
LA JEEP DONT LA PRÉSENCE EN GASPÉSIE OU AUX ENVIRONS AURAIT ÉTÉ CONSTATÉE PAR DES TÉMOINS OCULAIRES À L’ÉPOQUE OÙ LES CRIMES FURENT COMMIS.
- IV –
LA JEEP DU DOCTEUR BURKETT ET DE M. FORT
IV –
LA JEEP DU DOCTEUR BURKETTE ET DE M. FORD
Il fut établi au procès qu’un Docteur Burkett et un M. Ford, deux Américains de Pennsylvanie, vinrent faire la chasse à l’ours dans les bois environnant Gaspé du 27 mai 1953 jusqu’au 4 juin 1953 et qu’ils retournèrent en Pennsylvanie quelques jours avant l’arrivée des Linsey à Gaspé.
Le docteur Burkett et M.Ford ne furent pas témoins à l’enquête du Coroner non plus qu’à l’enquête préliminaire.
Russel Patterson, leur guide, fut témoin lors de la dernière séance de l’enquête du Coroner le 27 août 1953.
Voici ce que disent le Docteur Burkett, Ford et Patterson quant à la jeep et quant aux vêtements qu’ils portaient :
DOCTEUR GORDON BURKETT, à l’enquête :
Quant à la jeep: (it was) a greyish army-type jeep, a standard civilian jeep but very similar to army-type with canvas top and canvas curtains... the metal work was grey. As to the canvas, he is not sure whether it was grey or not.
Quant à sa personne: il avait 43 ans en 1953. Il en a maintenant 54, mais il est demeuré jeune d’apparence.
Quant aux vêtements qu’il portait le 27 mai : « I would have, I believe, my regular army O’D.’s. They would be khaki colour and perhaps an army shirt, khaki colour, or a cotton shirt. I am not sure.. and a canvas, tan, hunting coat, or I could have had on a fatigue jacket. Now, that is a longer jacket that you use in the service. Might have had that, I would not remember for sure. I would say I was wearing khaki-coloured garments”.
RUSSEL PATTERSON, lors de l’enquête du Coroner:
« ((Our jeep was) in wood with canvas and plastic windows. The color was light grey with a darker canvas, and old canvas”. Il déclare n’avoir pas remarqué, au cours de leur partie de chasse, d’autres voitures américaines, mais ils eurent l’occasion de parler à plusieurs personnes dans les bois « a lot every day ». Ils rencontrèrent parfois d’autres « parties » de chasseurs.
RUSSEL PATTERSON, lors de cette enquête :
Quant à la jeep : (it was) grey, in very good condition, a canvas top also in very good condition ».
Il mesure 5’ 11” et son poids actuel est de 146 livres.
Il était âgé, en 1953, de 25 ou 26 ans.
-V-
LA JEEP DES FRÈRES TAPP
Le matin du 27 mai 1953, les frères Alwin et Gerald Tapp de Moncton, Nouveau-Brunswick, se trouvaient dans le « grill » de l’hôtel Baker à Percé lorsqu’ils eurent une conversation avec deux individus dont l’un leur parut être un Américain venu en Gaspésie pour y chasser l’ours et l’autre être le guide de cet Américain. Ils consommèrent tout d’abord un ou deux verres de bière avec l’Américain et lorsque le guide entra, il consomma lui-même un verre de bière. En entrant dans le bar, celui qui paraissait être le guide alla lui-même prendre un verre de bière, mais il le prit au bar et ne se joignit pas aux autres. L’Américain lui demanda : « Did you fill the jeep with gas »? et il répondit dans l’affirmative. Les frères Tapp lurent, quelques semaines plus tard, dans les journaux de Moncton que, d’après Coffin, les Lindsey et Claar auraient rencontré une jeep appartenant à des Américains alors qu’ils étaient dans le bois.
Ce qui précède constitue l’essentiel des informations que l’un des frères Tapp, Alwin, communiqua au capitaine Raoul Sirois de la Sûreté provinciale, le 28 juillet, au cours d’une conversation téléphonique dont son frère Gerald avait pris l’initiative. Ces informations furent consignées le même jour par le capitaine Sirois qui dicta ses notes au sergent Vanhoutte lequel les transcrivit. Les notes ainsi transcrites furent remises au capitaine Matte. <
Ni le capitaine Matte ni M. Vanhoutte ni qui que ce soit communiquèrent avec les frères Tapp avant le procès de Coffin. En fait, personne ne communiqua avec eux avant l’automne de 1955.
Les frères Tapp ne témoignèrent ni à l’enquête du Coroner ni à l’enquête préliminaire ni au procès.<
Au cours du mois de septembre 1955, Gerald Tapp lut dans les journaux que les avocats de Coffin demandaient un nouveau procès et que l’on avait découvert de la nouvelle preuve, plus particulièrement, une preuve à l’effet qu’un médecin de Toronto (le docteur Wilson) avait vu une jeep jaune avec deux Américains habillés dans des vêtements d’armée dans la région de la Gaspésie « at about the time ». Son frère et lui décidèrent alors de communiquer avec Me Gravel qui leur donna le conseil de se tenir tranquilles et qu’il communiquerait lui-même avec un avocat de Monton. Ils furent convoqués chez cet avocat de Moncton et signèrent tous deux, en date du 27 septembre 1955, des affidavits qui furent subséquemment transmis au Ministère de la Justice et qui sont cotés respectivement comme pièces 22 et 23 de l’exhibit no 20.
GERALD TAPP, dans son affidavit du 27 septembre 1955 :
Le 27 mai 1953, vers les onze heures a.m., il prit une chopine de bière à l’Hôtel Baker dans le Cocktail Lounge à l’arrière de l’hôtel aver un homme de 5’6 ou 7 de haut, stocky et pesant entre 165 et 170 livres et dont l’âge pouvait se fixer entre de 35 à 45 ans.
« Part of his dress : American-Army issue clothing; rubber boots with high leather tops ».
“He was a businessman or a professional of some kind. He said he had been in the area during the war”.
Dix minutes plus tard, entra dans le lounge un homme qu’il crut être le guide du premier; cet homme mesurait entre de 5’8 et 6’, était mince, était âgé de 25 à 30 ans et pouvait peser environ 160 livres.
« Dark complexion – a local man ».
Clothing of rougher type: breeches and bush shirt and high leather boots.”
Le premier lui demanda: “Is everything in the jeep?”
GERALD TAPP, au cours de cette enquête :
L’homme avec lequel il causa était un Américain qui dit venir de Pennsylvanie en Gaspésie pour chasser l’ours. « He was a very pleasantman and some sort of a professional man.
Il avait entre 30 et 35 ans, 5’ 6 ou 7, “a bit on the stocky side. He knew the area quite because he had been stationed in an American unit at Sandy Beach or somewhere around the area as an instrument player in an orchestra”. He had brown khaki pants, American –Army issue and also wore long boots, leather or rubber, is not sure. They were bush boots.
The other man was almost 6’, tall, very slim and looked like a local man, a local bush-man, dressed exactly the same with American-issue clothing”.
His brother saw the jeep when he looked out the window, but, he, Geald, did not see it.
The guide had American Army-issue pants on and he had dark collared shirt and I am almost sure that the sleeves of his shirt were rolled up.
“When the guide said: “Th jeep is ready”, I turned and saw te front pat of a jeep and the one that I saw, to the best of my knowledge and memory, was a faded brown or a brown turning grey. It looked to be a war-surplus jeep. It would be something in between. It would be like a brownish army paint that had faded. It had a canvas top. Ignores its colour.
He is positive they were at Baker’s Hotel on the 27th of May.
RUSSEL PATTERSON, dans un affidavit date du 3 octobre obtenu de lui par le sergent Vanhoutte déclare :
Le soir de l’arrivée de Ford et de Burkett, lui et Ford prirent de la bière dans le lounge de l’Hotel Baker.
Le matin du 27 mai, « we drove the jeep behind the Baker’s Hotel and he and Ford ;went in for a point of beer. »
Dans cet affjdavit, Patterson ne parle pas d’avoir, le matin du 27 mai, rencontré un ou des étrangers.
Entendu au cours de cette enquête, Patterson, après avoir nié avoir signé une déclaration en date du 3 octobre 1955, est bien obligé de reconnaître sa signature sur l’affidavit qu’on lui exhibe et il ajoute : « If I signed it, then it was true. »
Il déclara devant nous avoir été interrogé un soir par un des avocats de la défense de Coffin. Cet avocat était accompagné de Donald Coffin. Cette entrevue aurait eu lieu peu de temps après que Coffin eut été mis en accusation.
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Ce ne fut qu’après avoir entendu parler des affidavits des frères Tapp que les officiers de la Sûreté provinciale s’avisèrent de faire une nouvelle enquête. C’est au cours de cette enquête qu’ils obtinrent l’affidavit susdit de Russel Patterson en date du 3 octobre 1955.
Dans son rapport du 3 octobre 1955, M Vanhoutte déclara qu’un M. David Miller, commis au grill de l’Hôtel Baer, lui déclara se rappeler avoir vu Russel Patterson et M. Ford au grill de l’hôtel, aux environs du 27 mai 1953 et y avoir également vu les frères Tapp, mais déclara aussi ne pouvoir relier les deux groupes l’un à l’autre.