14 mars 2008

POURQUOI LES AVOCATS DE COFFIN SE SONT-ILS TUS? (DEUXIÈME PARTIE)



POURQUOI LA DÉFENSE S'EST TUE (DEUXIÈME PARTIE)
EXTRAIT DU RAPPORT BROSSARD
PARTIE IV
LA PREUVE DÉLAISSÉE, IGNORÉE OU.. ABSENTE
Chapitre 2
POURQUOI LA DÉFENSE S’EST TUE

Un des deux autres avocats de Wilbert Coffin, Me Louis Doiron, ancien confrère de Me Gravel et de Me Maher à l’Université, et dont les services ne furent retenus qu’au tout début de l’audition du procès, à Percé, alors que l’on procédait au choix des membres du jury, témoigna devant cette Commission. Voici le résumé de parties de son témoignage pertinent à cette question de la décision de ne pas présenter de défense :
Transcriptions pages 6043 et suivantes :
« Si des témoins n’ont pas été entendus, c’est à la suite de la décision de ne pas faire entendre Coffin et de ne pas présenter de défense au procès, ce qui justifiait la décision de ne pas assigner les témoins.
Il y a eu à un moment donné une décision de prise de ne pas faire de preuve en défense ni par l’accusé, ni par d’autres témoins.
On avait pensé, à un moment donné, présenter une défense, mais par la suite, il y a eu discussion, et les avocats de la défense sont venus d’accord pour ne pas présenter de témoins.
Un jour, il est arrivé à la cabine qu’occupaient ses collègues et Me Maher lui formula une foule de raisons qui justifiaient de ne pas présenter de témoins; c’est alors qu’il signifia qu’il était parfaitement d’accord.
Quant à lui, il s’agissait d’une décision purement d’assentiment, car il n’avait pas vu Coffin et n’avait pas discuté avec lui.
La décision fut prise à la cabine alors que les deux procureurs, Me Gravel et Me Maher, étaient présents. Mais celui qui a présenté des arguments c’est Me Maher. Il a eu l’impression que Mes Maher et Gravel étaient d’accord lorsqu’ils lui parlèrent.
Il n’y a pas eu de dissidence.
Il croit que c’est au dernier jour du procès, au dernier jour de la preuve de la Couronne, qu’il a été décidé qu’on ne présenterait pas de défense.
En aucun moment, Coffin n’a-t-il manifesté d’une façon quelconque son désir de témoigner.
Il ne se souvient pas qu’au cours du procès, Coffin ait jamais fait de geste ou laissé entendre qu’il voudrait à un moment donné intervenir ou que l’un ou l’autre des deux avocats ait mentionné quel pouvait être le désir de Coffin sur ce sujet-là.
La raison principale de la décision fut que, à toutes fins pratiques, le témoignage de Coffin n’apporterait rien à ce qui avait été rapporté par la police à son sujet. (il s’agit des déclarations qu’il avait faites à Doyon au cours de son voyage dans le bois avec lui et Synnett).
Il n’a pas été témoin que la décision ait été transmise à Coffin, soit par l’un ou l’autre des deux avocats, sûrement pas par lui.
Il ne se souvient pas que lorsque Maher a déclaré « the defence rests », Coffin ait manifesté extérieurement et physiquement quelque sentiment que ce soit.
Il a eu connaissance qu’il fut question de Me Maloney dans la cabine, mais il ne se souvient pas d’appel à Me Maloney. Il croit que les téléphones à Me Maloney ont été faits relativement à la légalité de la preuve de Madame Petrie qui était la concubine ou la femme de Coffin.
Il croit aussi qu’il y a eu des téléphones à Me Maloney relativement à la présomption de vol récent dans le cas d’une cause de meurtre.
S’il se souvient bien, lorsque dans la cabine de Me Maher et de Me Gravel, il fut décidé de ne pas présenter de défense ou de témoins, il y a eu une discussion à savoir de quelle façon on s’exprimerait devant le Tribunal et il croit que c’est la formule qui a été adoptée « The defence rests ».
On tomba d’accord sur cette formule à la fin de la preuve de la Couronne.
Jusqu’à une phase assez avancée du procès, il y avait entente entre les procureurs de la défense à l’effet qu’on présenterait une défense, mais, à un moment donné, il est entré dans la cabine et à ce moment-là, on lui a demandé son opinion sur l’opportunité de faire entendre Coffin ou de ne pas faire entendre ; à ce moment-là, on a invoqué certains arguments pour demander son adhésion, et c’est alors qu’il a donné son assentiment croyant, à ce moment-là, que Me Gravel et Me Maher en avaient discuté entre eux et en étaient venus d’accord sur ce point.
À compter de ce moment, il croit qu’il n’y a plus eu de discussion pour décider si on devait présenter une défense ou non.
C’est à la fin du procès, alors que la preuve de la Couronne tirait à sa fin, qu’il fut invité par ses collègues de défense à présenter la plaidoirie en français, mais ce, avant que la preuve de la Couronne n’ait été terminée.
Ce serait quatre ou cinq jours avant que la preuve de la Couronne ne fût terminée qu’il aurait été invité à prononcer le plaidoyer en français. IL CROIT QU’À CE MOMENT IL SAVAIT QU’IL SERAIT APPELÉ À PLAIDER APRÈS LES PROCUREURS DE LA COURONNE (ce qui signifiait qu’aucune défense ne serait offerte). »
L’un des jurés, M. Romuald Caron, nous a, d’autre part, informés (le dossier conjoint ne l’indique pas) que la Couronne a terminé sa preuve un jeudi et que la Cour les informa alors que la défense commencerait sa preuve le lundi suivant. Il se serait donc écoulé trois jours francs entre la fin de l’enquête et la déclaration « The defence rests ».
Me FRANÇOIS DE B. GRAVEL, autre défenseur de Wilbert Coffin, fut lui aussi longuement interrogé devant cette Commission. (à suivre)
J’AFFICHERAI LA SEMAINE PROCHAINE DES EXTRAITS DU TÉMOIGNAGE DE MTRE GRAVEL SUR CETTE QUESTION.

2 commentaires:

Anonyme a dit...

Me Fortin,
Je comprends la signification de l'expression "the defence rests" : la défense estime que la preuve est faible et qu'il n'y a pas lieu, par conséquent, de présenter une défense.
Mais, compte tenu de votre expérience, est-ce ainsi, dans le milieu juridique, qu'on interprète habituellement les choses ? Cette expression ne cache-t-elle pas plutôt une crainte, soit celle, en présentant une défense, de nuire à la cause qu'on veut défendre ?
Merci.
M. Mathieu, Terrebonne

Clément Fortin a dit...

Monsieur Mathieu,
Je ne crois pas que l’expression « The defence rests » soit une formule magique. Dans les traductions que j’ai faites des extraits du rapport Brossard, j’ai utilisé cette expression qui est courante dans le monde judiciaire. À titre d’exemple, « The Crown rests its case » que l’on exprime en français de la façon suivante : « La couronne ou la poursuite déclare sa preuve close ». Relisez l’explication qu’en donne Me Maher. Il cherchait une expression élégante pour dire qu’il ne présenterait pas de défense. S’il avait présenté une défense, il aurait dit quelque chose comme ça : « La défense déclare sa preuve close. » Dans le dictionnaire Harrap’s French and English, j’ai trouvé les expressions suivantes : « To rest the case » signifie « conclure son plaidoyer ». Et « The defence, the prosecution, rests » signifie « plaise au tribunal d’accepter mes conclusions. » Vous pouvez constater que Me Maher n’a pas choisi la bonne expression. À titre d’exemple, il aurait dû dire : « La défense n’a pas de preuve à soumettre ou à présenter ».
Dans cette cause, il est évident que la défense craignait de soumettre une défense qui aurait permis à la poursuite de faire une contre-preuve qui aurait été fatale à Coffin.