EXTRAITS DU RAPPORT DE LA COMMISSION BROSSARD
Chapitre 4 (première partie)
LES CONCESSIONS MINIÈRES ET LES DÉPENSES DE COFFIN
-I-
Les concessions minières de Coffin
Wilbert Coffin possédait un camp dans le canton York, sur les bords d’un embranchement de la rivière St-Jean communément appelé « la deuxième fourche ». La preuve a révélé que, dans les environs immédiats de ce camp, la famille de Coffin et les gens de son entourage détenaient diverses concessions minières (claims).
La deuxième fourche traverse en particulier les rangs III, IV et V du canton York, entre les lots numéro 40 et 55. Il appert qu’au printemps de 1953, les concessions suivantes étaient en vigueur :
Lot Rang
Donald F. Coffin 44 IV
Wilbert Coffin 45 IV
J.F.Coffin 49 IV
Albert Coffin 50 IV
Donald H. Coffin 56 IV
Marion Petrie (sous le
Nom de Mrs. W.D. Coffin) ½ sud de 46
et 47 III
Quelle pouvait être la valeur de ces concessions et, en particulier, de celles de Wilbert Coffin et de Marion Petrie ?
Tout ce qu’il est possible d’en savoir avait déjà été révélé par la preuve de la Couronne au procès de Coffin. La défense n’a pas jugé bon d’y ajouter et, devant la Commission, personne n’a suggéré de preuve additionnelle à celle que la Commission, par sa propre enquête, avait pu obtenir et rendre publique. La Commission est donc justifiée de baser ses conclusions sur l’analyse de l’ensemble de cette preuve.
Il appert ainsi, du témoignage au procès de Angus MacDonald et William Hastie, que pour intéresser Hastie à son histoire, Coffin lui montra une lettre de Falconbridge Nickel Company à l’effet que l’analyse d’un certain échantillon de minerai démontrait une teneur en cuivre de 17 %, soit une très forte proportion. Contrairement à l’affirmation de Monsieur Jacques Hébert à la page 35 de son deuxième ouvrage, la lettre (qui ne fut pas produite au procès) n’était pas adressée à Coffin et ne disait pas de quelle propriété venait l’échantillon analysé.
Cependant, Coffin assura Hastie que cette analyse portait sur du minerai provenant de sa concession et, sur la foi de cette assurance, Hastie se mit en route pour aller inspecter les lieux.
Il faut ajouter que Angus MacDonald, à son tour, témoigna à l’effet qu’il avait envoyé pour analyse à la Falconbridge Nickel un échantillon de minerai que Coffin lui avait remis, et qu’il avait reçu, sans cependant en donner des détails. MacDonald qui est aujourd’hui décédé avait ajouté que Coffin lui avait dit que cet échantillon provenait de la région de la grande fourche de la rivière St-Jean, mais il n’avait pas non plus contrôlé lui-même cette affirmation.
Comme Coffin n’a pas témoigné, le récit de ces événements n’a pas été précisé au procès. Cependant, devant cette Commission, la preuve a permis de constater que le camp de Coffin et les concessions minières énumérées ci-dessus se trouvaient à l’endroit que Hastie avait dit lui avoir été indiqués sur une carte par Coffin à la deuxième fourche de la rivière St-Jean comme endroit du prétendu gisement.
Là cependant s’arrête la preuve de l’intérêt de ces concessions.
D’une part, en effet, Hastie et son compagnon Kyle se sont rendus au camp de Coffin et, sur la base des indications qu’il leur avait fournies sur une carte, ils ont examiné pendant plusieurs heures le lit, à peu près entièrement découvert, de la deuxième fourche de la rivière St-Jean, sans y rien trouver.
Dans son affidavit produit auprès du Ministère de la Justice le 9 octobre 1955, Coffin explique, au paragraphe 34 :
« The Crown lawyers suggested there was something suspicious about the failure of Mr. Hasty from Val d’Or to find ore resembling or similar to the specimen I had shown to him He would have found the ore if I had been able to go in with him but I was unable to go with him due to the fact that the police requested me to assist them in the search for the missing American hunters. Mr. Hastey could not have understood the map I gave him or else the map was not sufficient for his purposes.”
On peut cependant soutenir raisonnablement que Hastie et Kyle ont dû faire ces recherches avec sérieux, puisqu’ils avaient effectué un voyage spécial dans ce but de Val d’Or à Gaspé.
Par ailleurs, parlant toujours de ces concessions minières, Monsieur Jacques Hébert soutient, à la page 122 de son deuxième volume, que Coffin « s’y est intéressé jusqu’à son dernier souffle, sûr d’avoir découvert un filon d’une grande richesse. » Or ces concessions sont toutes expirées depuis 1954. Si Coffin ou ses familiers avaient tenu à les conserver, ils auraient pu facilement y arriver. Coffin lui-même aurait pu y voir durant son incarcération, comme Monsieur Jacques Hébert en a obtenu la confirmation en interrogeant le représentant du ministère des Ressources naturelles, Monsieur Adélard Fortin :
« Q. Monsieur Fortin, quelqu’un qui ne paie pas sa rente, comme vous avec dit, au bout d’un an, perd-il son droit?
R. Oui, monsieur.
Q. Est-ce que quelqu’un – comment est-ce que ça doit se faire, ce paiement-là ? Est-ce qu’il faut le faire directement ou par personne interposée?
R. Ça peut se faire, soit en venant déposer au bureau l’argent requis, ou en l’envoyant par malle par chèque, etc.
Q. Mais un détenu, par exemple, est-ce qu’il peut continuer de faire affaire avec votre Département?
R. Un détenu?
Q. Oui, dans une prison?
R. Par l’entremise de son avocat, je ne vois pas pourquoi il ne le pourrait pas. »
Or, au contraire, Coffin ni personne n’y a vu et, depuis 1954, aucun « claim » n’avait même été enregistré dans cette même région jusqu’à l’enquête devant la Commission sur le sujet, les 18 et 19 juin 1964.
Ces différents facteurs tendent donc à démontrer plutôt que les concessions de Coffin – d’ailleurs d’importance territoriale minime – n’avaient pas la valeur sensationnelle qu’on voudrait maintenant leur attribuer, loin de là. (à suivre)
Chapitre 4 (première partie)
LES CONCESSIONS MINIÈRES ET LES DÉPENSES DE COFFIN
-I-
Les concessions minières de Coffin
Wilbert Coffin possédait un camp dans le canton York, sur les bords d’un embranchement de la rivière St-Jean communément appelé « la deuxième fourche ». La preuve a révélé que, dans les environs immédiats de ce camp, la famille de Coffin et les gens de son entourage détenaient diverses concessions minières (claims).
La deuxième fourche traverse en particulier les rangs III, IV et V du canton York, entre les lots numéro 40 et 55. Il appert qu’au printemps de 1953, les concessions suivantes étaient en vigueur :
Lot Rang
Donald F. Coffin 44 IV
Wilbert Coffin 45 IV
J.F.Coffin 49 IV
Albert Coffin 50 IV
Donald H. Coffin 56 IV
Marion Petrie (sous le
Nom de Mrs. W.D. Coffin) ½ sud de 46
et 47 III
Quelle pouvait être la valeur de ces concessions et, en particulier, de celles de Wilbert Coffin et de Marion Petrie ?
Tout ce qu’il est possible d’en savoir avait déjà été révélé par la preuve de la Couronne au procès de Coffin. La défense n’a pas jugé bon d’y ajouter et, devant la Commission, personne n’a suggéré de preuve additionnelle à celle que la Commission, par sa propre enquête, avait pu obtenir et rendre publique. La Commission est donc justifiée de baser ses conclusions sur l’analyse de l’ensemble de cette preuve.
Il appert ainsi, du témoignage au procès de Angus MacDonald et William Hastie, que pour intéresser Hastie à son histoire, Coffin lui montra une lettre de Falconbridge Nickel Company à l’effet que l’analyse d’un certain échantillon de minerai démontrait une teneur en cuivre de 17 %, soit une très forte proportion. Contrairement à l’affirmation de Monsieur Jacques Hébert à la page 35 de son deuxième ouvrage, la lettre (qui ne fut pas produite au procès) n’était pas adressée à Coffin et ne disait pas de quelle propriété venait l’échantillon analysé.
Cependant, Coffin assura Hastie que cette analyse portait sur du minerai provenant de sa concession et, sur la foi de cette assurance, Hastie se mit en route pour aller inspecter les lieux.
Il faut ajouter que Angus MacDonald, à son tour, témoigna à l’effet qu’il avait envoyé pour analyse à la Falconbridge Nickel un échantillon de minerai que Coffin lui avait remis, et qu’il avait reçu, sans cependant en donner des détails. MacDonald qui est aujourd’hui décédé avait ajouté que Coffin lui avait dit que cet échantillon provenait de la région de la grande fourche de la rivière St-Jean, mais il n’avait pas non plus contrôlé lui-même cette affirmation.
Comme Coffin n’a pas témoigné, le récit de ces événements n’a pas été précisé au procès. Cependant, devant cette Commission, la preuve a permis de constater que le camp de Coffin et les concessions minières énumérées ci-dessus se trouvaient à l’endroit que Hastie avait dit lui avoir été indiqués sur une carte par Coffin à la deuxième fourche de la rivière St-Jean comme endroit du prétendu gisement.
Là cependant s’arrête la preuve de l’intérêt de ces concessions.
D’une part, en effet, Hastie et son compagnon Kyle se sont rendus au camp de Coffin et, sur la base des indications qu’il leur avait fournies sur une carte, ils ont examiné pendant plusieurs heures le lit, à peu près entièrement découvert, de la deuxième fourche de la rivière St-Jean, sans y rien trouver.
Dans son affidavit produit auprès du Ministère de la Justice le 9 octobre 1955, Coffin explique, au paragraphe 34 :
« The Crown lawyers suggested there was something suspicious about the failure of Mr. Hasty from Val d’Or to find ore resembling or similar to the specimen I had shown to him He would have found the ore if I had been able to go in with him but I was unable to go with him due to the fact that the police requested me to assist them in the search for the missing American hunters. Mr. Hastey could not have understood the map I gave him or else the map was not sufficient for his purposes.”
On peut cependant soutenir raisonnablement que Hastie et Kyle ont dû faire ces recherches avec sérieux, puisqu’ils avaient effectué un voyage spécial dans ce but de Val d’Or à Gaspé.
Par ailleurs, parlant toujours de ces concessions minières, Monsieur Jacques Hébert soutient, à la page 122 de son deuxième volume, que Coffin « s’y est intéressé jusqu’à son dernier souffle, sûr d’avoir découvert un filon d’une grande richesse. » Or ces concessions sont toutes expirées depuis 1954. Si Coffin ou ses familiers avaient tenu à les conserver, ils auraient pu facilement y arriver. Coffin lui-même aurait pu y voir durant son incarcération, comme Monsieur Jacques Hébert en a obtenu la confirmation en interrogeant le représentant du ministère des Ressources naturelles, Monsieur Adélard Fortin :
« Q. Monsieur Fortin, quelqu’un qui ne paie pas sa rente, comme vous avec dit, au bout d’un an, perd-il son droit?
R. Oui, monsieur.
Q. Est-ce que quelqu’un – comment est-ce que ça doit se faire, ce paiement-là ? Est-ce qu’il faut le faire directement ou par personne interposée?
R. Ça peut se faire, soit en venant déposer au bureau l’argent requis, ou en l’envoyant par malle par chèque, etc.
Q. Mais un détenu, par exemple, est-ce qu’il peut continuer de faire affaire avec votre Département?
R. Un détenu?
Q. Oui, dans une prison?
R. Par l’entremise de son avocat, je ne vois pas pourquoi il ne le pourrait pas. »
Or, au contraire, Coffin ni personne n’y a vu et, depuis 1954, aucun « claim » n’avait même été enregistré dans cette même région jusqu’à l’enquête devant la Commission sur le sujet, les 18 et 19 juin 1964.
Ces différents facteurs tendent donc à démontrer plutôt que les concessions de Coffin – d’ailleurs d’importance territoriale minime – n’avaient pas la valeur sensationnelle qu’on voudrait maintenant leur attribuer, loin de là. (à suivre)
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